"Interactif", une nouvelle d'anticipation, épisode 1

 

Le jour se lève chez les Caruso. Encore endormie, Madame perçoit le chant des oiseaux et la lumière matinale. Elle soulève une paupière, puis l’autre : la chambre baigne dans une clarté orangée. Elle baille et s’étire comme un chat. D’un clin d’œil, elle affiche son programme contre la paroi. Ce mardi se présente sous les meilleurs augures ! Elle touche le variateur : les oiseaux arrêtent de chanter et l’éclairage efface toutes les zones d’ombre de l’appartement.

 

Josiane détache le module d’hydratation de son poignet et pose le bracelet sur la table de nuit. Elle s’assied sur les toilettes biodégradables. Elle sourit : ces WC sont l’un des derniers éléments qu’elle refuse de remplacer par une solution plus moderne. Le videur de sondes la dégoûte et les matelas absorbants ne sont pas assez confortables selon elle. Elle profite de ces quelques secondes de calme pour sélectionner sa tenue anti-transpiration.

 

Après la pause pipi, elle enfile le vêtement. Ses cheveux sont automatiquement noués en un chignon serré. La jauge sur la brosse lui indique qu’il faudra bientôt remplir le réservoir de laque coiffante. « Je le ferai tout à l’heure. » Elle tourne le bouton près de sa gorge et les électrodes se fixent sur sa peau. Elle les enclenchera dans la capsule de téléportation, car elle a un rendez-vous important qui nécessite un déplacement.

 

En effet, ce matin elle va changer ses filtres à allergènes. Chaque fois qu’elle doit s’y rendre, elle râle contre les pharmaciens qui n’ont pas encore trouvé une solution self-service. Il y a quelques années, ils vendaient des kits pour le faire soi-même à la maison, mais une vague de blessures avaient obligé les autorités à retirer ce produit du marché.


Une fois dans la capsule, elle enclenche les électrostimulateurs. Ceux-ci contractent ses muscles sans effort et développent harmonieusement la silhouette de Josiane. Comme toujours dans les services pratiqués par des humains, il y a du retard. Elle poursuit son entraînement dans son véhicule en attendant son tour. Après quelques interminables minutes d’attente dans ce monde de précision, la diode passe au vert. Elle franchit la porte et s’asseye sur un strapontin.

 

Un pharmacien, assis sur un tabouret téléporteur, la rejoint instantanément. Il prononce qu’un seul mot : « Brucelles ». La pince apparaît entre ses doigts.

Josiane est satisfaite. Sa demande de dispense des formules de politesse a enfin été validée. Plus de « Bonjour Madame Caruso, comment allez-vous ? Vous venez pour changer vos filtres, n’est-ce pas ? », ces flatteries inutiles qui ne font qu’augmenter le déficit de temps libres de la classe ouvrière.

 

Le professionnel se penche sur l’oreille droite de sa cliente. Pendant qu’il cherche à attraper le filament, Josiane ne peut s’empêcher d’avoir de la sympathie pour ce jeune homme. Il a dû travailler dur pour en arriver là : étude de chirurgie, travaux pratiques dans les boucheries, des horaires strictes et difficiles. Elle entend un petit tintement dans sa tête : signal qu’aucune allergie n’est à craindre pour les deux prochains mois.


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