Rompre de Yann Moix
Mon mari
écoute On n’est pas couché. Moi je ne
regarde pas la télévision :
un casque sur les oreilles et les doigts sur
le clavier occupés à rédiger. Le programme défile, simple reflet sur mes
lunettes. C’est ainsi que j’ai découvert l’existence de Yann Moix. Je sais
qu’il était chroniqueur chez Ruquier, mais je n’ai aucune idée de ses opinions,
de ses propos, etc. J’ai d’ailleurs aperçu sa séquence promo de Rompre dans son ancienne émission.
Mais ce
n’est pas cela qui a piqué ma curiosité.
Rompre semble être LE livre à chroniquer. J’ai vu des
dizaines de chroniqueurs s’attaquer à Yann Moix. Alors j’ai décidé de me faire
ma propre opinion, parce que justement, moi, je n’ai pas d’idées préconçues sur
ce gaillard.
Yann Moix
écrit et il le fait bien.
D’ailleurs,
son quatrième de couverture m’a étonnée.
Est-ce
une crise identitaire que se sentir obliger de le préciser au dos du livre
qu’on vient de signer, après un Prix François-Mauriac, un Prix Goncourt, un
Prix Renaudot ?
Est-ce
que parler à la télévision annihile un prestigieux CV d’écrivain ?
Les
auteurs devraient-ils rester enfermer dans leur grotte et ne révéler leur
existence que par la publication de leurs bouquins, à l’heure des réseaux
sociaux, à l’heure où les maisons de production (musicale, littéraire, etc) n’accordent
leur crédit qu’aux personnes connues du public ?
Revenons-en
au livre, si vous le voulez bien.
Dans un
dialogue, le personnage principal nous raconte comment il a quitté son
Emmanuelle par « puéril défi et vraie-fausse susceptibilité ». Je
cite :
« Nos
chambres n’étant pas encore préparées - si elles l’avaient été, nous serions
encore ensemble aujourd’hui... »
« ...j’avais
donné ma vie et quelques enfants à une femme qui plus jamais n’en voudrait avec
moi – n’en voudrait pas davantage qu'une poignée d’immondices, qu’un rat crevé,
qu’un bidon d’huile rouillé, qu’un œil d’enfant mort dans sa soupe ».
« ...parce
qu’elle eût pu être prononcée par mes pires ennemis : "pourquoi as-tu
attendu 49 années pour t’intéresser à la misère humaine ? » »
Ok, sur
un coup de tête, on fait tous des conneries. On prend parfois de mauvaises décisions.
Avec le temps, avec du recul, on ferait différemment. Combien sommes-nous tous
plus intelligents après !
« Si
Emmanuelle et son yogi ont des enfants un jour, ceux-ci seront, avant que d’être
le fruit de leur amour, celui de notre rupture. Et de mon sale caractère. »
Tous les enfants
ne sont-ils pas le fruit des séparations des ex de leurs parents ? Vu le
nombre de ruptures de ce personnage, il peut rivaliser avec le héros des films Fonzy et Starbuck !
J’ai
particulièrement apprécié que l’auteur pose les questions que le lecteur
aimerait poser au personnage central : n’avez-vous jamais essayé la psychanalyse ?
Aimeriez-vous sortir de cette spirale ? N’êtes-vous pas sadique ?
Vous
remarquerez peut-être que je parle du personnage du livre, et non pas de Yann
Moix. Pourquoi ? Parce que sur la couverture, c’est marqué
« roman ». Parce que la résilience devrait être une compétence banale
chez un écrivain, par sa capacité à intellectualiser, à imaginer un déroulement
des événements plus acceptable. Mais le personnage collectionneur de souvenirs
n’en jouit pas.
Même si
je crois que ces pages sont pleines de sincérité, même si j’imagine que ce
livre est un moyen pour clore ce chapitre de sa vie ou, peut-être une ultime
tentative de l’atteindre, elle, j’avoue que je ressens un malaise en lisant ce
texte : la sensation d’être témoin d’une prise d’otage de cette Emmanuelle
par la publication de ce livre et par le battage médiatique qui l’entoure.
Commentaires
Enregistrer un commentaire